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Séismes,
tsunamis, inondations, les catastrophes naturelles tendent par le sentiment
d’une fréquence accrue et l’importance de leur médiatisation à devenir un
élément structurel de l’actualité mondiale, au même titre que les guerres et
les élections. Irruptions de l’imprévu et de l’imprévisible, elles sont un
défi lancé à l’État, à l’ordre humain dans son ensemble. La faculté à les
traiter est un des enjeux fondamentaux de la légitimité étatique.
Faire preuve de sa souveraineté, saisir une opportunité
Une
défaillance de l’État en la matière ouvre une brèche dans laquelle peuvent
s’engouffrer les entrepreneurs politiques concurrents, porteurs d’une
contestation à base religieuse ou idéologique. Au-delà de la gestion et de la
prévention des risques ou même de l’organisation des secours, les enjeux de
la catastrophe naturelle sont également diplomatiques. Faut-il accepter de
l’aide ? Et de qui ? Le refus par l’Inde de l’aide proposée par les pays les
plus riches après le tsunami de 2004 en Asie du Sud-Est se place à la fois
dans une tradition de défense farouche de sa souveraineté nationale et dans
une volonté de ne pas mettre en cause son émergence en tant que puissance
régionale de premier ordre.
En plus
de sa seule dimension négative (la réaction à l’évènement), la catastrophe
naturelle a donc sur le plan politique une dimension positive. Elle ouvre un
champ des possibles à l’action publique, que celle-ci soit menée par des
états ou des instances internationales. Dans les discours, les commentaires,
les analyses, la catastrophe naturelle tend à n’être plus seulement décrite
comme une tragédie, comme un malheur infiniment regrettable, appartenant au
domaine du deuil et de la mémoire, mais également comme une chance, comme une
opportunité à saisir.
On peut
se référer à cet égard aux propos tenus par Condoleeza Rice, sur le Tsunami
tsunami de 2004 dans lequel la Secrétaire d’État américain avait vu une «
merveilleuse opportunité » ou, plus près de nous, à l’idée générale qui
circulait après le séisme en Haïti de 2010 et selon laquelle la catastrophe
offrait une occasion inédite de sauver un pays qu’on disait alors « maudit ».
Dans le contexte d’une crise globale, protéiforme, certaine, mais mal cernée,
la catastrophe pourrait faire figure d’une accélération salutaire de
l’histoire, ouvrant un état de grâce au volontarisme politique et
transfigurant des situations tendues et bloquées.
Catastrophe naturelle et unité nationale
C’est
bien cette idée qui transparaît en Turquie depuis dimanche dernier. Le séisme
ayant provoqué la mort de plus 500 personnes dans la ville de Van dans le
Kurdistan de Turquie est en effet intervenu au moment le plus aigu d’une
crise politique profonde dans laquelle le facteur kurde a pris une place
centrale. La reprise de la guerre contre le PKK se traduit depuis le mois
d’août par des bombardements réguliers à la frontière irakienne, une série
d’attentats meurtriers contre des cibles civiles et militaires en Turquie et
une dégradation des rapports entre Kurdes et Turcs dans les grandes villes où
ils cohabitent.
Le
tremblement de terre de Van a fourni aux responsables politiques (kurdes et
turcs) ainsi qu’aux faiseurs d’opinions une occasion rêvée pour mettre
l’accent sur l’unité nationale et la fraternité entre les deux principales
populations Anatoliennes. Les arrestations massives conduites à l’encontre de
responsables du BDP, le parti légal prokurde, ont cessé, de même que les
attaques du PKK depuis dimanche dernier. Une catastrophe implique un avant et
un après. La temporalité dans laquelle elle s’inscrit permet de diffuser dans
les imaginaires la possibilité d’une résolution accélérée des problèmes les
plus prégnants. Dans le cas turc, il s’agit de la redéfinition urgente du
collectif prenant en compte la pluralité Anatolienne qui est un enjeu majeur
du changement constitutionnel actuellement défendu par le parti au pouvoir.
La solidarité nationale mise en scène à l’occasion de ce tremblement de terre
en offre un aspect tangible et permet de diffuser un nouveau récit
identitaire allant en ce sens.
source Source : http://www.nonfiction.fr
Dav "2012 un nouveau
paradigme"
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Un jour, j’irai vivre en Théorie parce qu’il paraît qu’en Théorie, tout va bien. (Les mots surpendus)
jeudi 3 novembre 2011
Les catastrophes naturelles constituent-elles des opportunités politiques ?
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