La troupe qui fait de l'ombre au Cirque du Soleil
Je viens de
découvrir des artistes purement Québécois qui font le tour du monde et sont
reconnus à travers la planète.
En tout cas,
pour moi, je sais que je ne lis pas souvent les pages artistiques des journaux,
mais c’est la première fois que j’en entends parler. Ils sont tout simplement fantastiques.
Lolo
Lolo
Ils débarquent du Canada, ont l'air de routards en transit, et sont pourtant les patrons de choc d'une des plus fameuses compagnies de cirque du monde. En tournée en France, installés au parc de La Villette, à Paris, avec deux spectacles, La Vie et Psy, Les 7 doigts de la main, "The Seven Fingers" en anglais, possèdent la force d'un collectif dirigé par sept boss qui s'entendent comme larrons en foire. Leur rencontre a tout d'une "success story".

PSY juxtapose certaines des facettes les plus sombres de la psyché humaine au langage stimulant et exaltant des arts du cirque et nous révèle la beauté, l’humour et finalement l’omniprésence de nos névroses.
Psy est un hymne au courage et au pouvoir qui sommeillent en nous, nous permettant de surmonter nos peurs et nos névroses, dépasser nos limites et prendre notre envol !
Des potes, toute une bande, ayant beaucoup bourlingué entre chapiteaux et cabarets, décident de se prendre en main, se filent rendez-vous un beau jour du mois de février 2002 à San Francisco
et se retrouvent à sept autour d'une table. Une journée - bien arrosée -
de discussions plus tard, la toute nouvelle compagnie se baptise "Les 7
doigts de la main" et jette les bases de son premier spectacle, Loft.

- Sébastien Soldevila, porteur et acrobate
"Je suis le pouce, parce que je suis le plus gros, le plus évolué et le plus costaud puisque je porte et supporte la troupe",
commente en blaguant Sébastien Soldevila, 38 ans, seul Français de la
troupe. Porteur et acrobate, expert en main à main, cet ancien gymnaste
de haut niveau, ayant appartenu à l'équipe de France junior entre 20 et
24 ans, s'est musclé dans toutes les disciplines (trampoline, ski
acrobatique, tumbling).
- Isabelle Chassé, trapéziste et acrobate
Elle brandit son auriculaire comme un signe. "C'est le plus petit, comme moi, et ça ne fait pas grand-chose mais c'est indispensable", glisse Isabelle Chassé, 35 ans, trapéziste et acrobate. Dès l'âge de 5 ans, elle rêve de voler et fait tout pour concrétiser
son fantasme. Elle a 11 ans lorsqu'elle devient apprentie
contorsionniste à l'Ecole nationale de cirque, à Montréal. Dans la
foulée, elle décroche un contrat au Cirque du Soleil pour un numéro
interprété par quatre jeunes filles contorsionnistes. Elle a 13 ans, y
restera jusqu'à 24 ans, accrochant des médailles et des prix plein son
justaucorps.
"Au bout de tout ce temps passé dans la même troupe, j'avais envie d'autre chose, confie-t-elle. Lors
de notre réunion à San Francisco, les questions de fond ressemblaient à
"De quoi a-t-on encore envie dans la vie ?" et "Qu'est-ce qui nous
inspire ?". Mais aussi "Est-ce qu'on allait s'entendre pour de bon ?"." Dans Loft, elle se contorsionnait dans une baignoire remplie d'eau ; pour La Vie, elle se décarcasse dans une camisole de force. "Le style des 7 doigts n'est que la somme de ses parties."
- Patrick Léonard, jongleur et clown
A tous les doigts des deux mains, Patrick Léonard, 42 ans, préfère finalement le revers de la main droite, surtout dans La Vie. "L'un de mes numéros de prédilection est de jongler avec des bouteilles sur le revers de mes mains", commente-t-il avec un accent québécois comme on l'imagine.
Ce jongleur, acrobate, clown, par ailleurs quatre fois champion
canadien en patin à roulettes artistique, a 24 ans lorsqu'il débarque à
l'Ecole nationale de cirque de Montréal après des études de chimie. Il
rencontre Gypsy Snider, devenue sa femme, écume les cabarets, berlinois en particulier. "On avait tous envie de quelque chose de plus humain, sans gros costumes, ni énormes maquillages, se souvient-il. Le désir aussi de revenir à la réalité. Comme on vivait en colocation, on s'est retrouvés à mettre en scène Loft comme à la maison ou presque." Dans La Vie, il se livre à un épatant numéro de strip-tease en passant sous un trapèze qui sonne comme un portique d'aéroport. "Le cirque, c'est le risque, la peur la plus pure, qu'il faut dépasser."
- Samuel Tétreault, équilibriste
Québécois de Montréal, Samuel Tétreault, 37 ans, est "le majeur", parce qu'il est "le plus grand, celui qui a rassemblé les autres au début de la compagnie et veille encore à préserver l'harmonie lorsque les doigts se tiraillent un peu !".
Fils d'un galeriste d'art contemporain, il vit dans une maison "extension des expositions de la galerie", se passionne pour le hockey sur glace, puis pour le cirque. Il a 14 ans. Après avoir appris à rouler en monocycle, jongler avec trois balles, faire des acrobaties, du trampoline, il opte pour l'équilibre sur les mains.
Etudiant pendant sept ans à l'Ecole nationale de cirque de Montréal,
puis artiste du Cirque du Soleil, il rêve d'autre chose, croise Isabelle
et Shana, téléphone à quelques amis. "J'ai contacté une dizaine de personnes au total pour leur donner rendez-vous très vite, explique-t-il. La date ultime pour avoir une subvention était fin février 2002. Le temps pressait." Ce leader, également sur le plateau de La Vie, détient la seconde place du championnat du monde de course sur un bras au Japon ! "On est tous humains, on va tous mourir un jour... Alors, en attendant, apprenons à mieux nous connaître et à mieux vivre ensemble."
- Nassib El-Husseini, directeur
Directeur général de la compagnie, Nassib El-Husseini, 49 ans, a remplacé le "doigt fondateur", Faon Shane, désireuse d'autres aventures. Il est aussi, avec l'accord des six autres, le pouce, parce qu'il "donne souvent un coup de pouce". Il revendique de "transformer les faiblesses en force, selon les principes du judo" et recommande "d'aligner chaque matin le coeur avec la tête".
Au sein des 7 doigts de la main, il se bat pour que "le processus de travail créatif reste agréable, pertinent, enrichissant, et que le travail de la compagnie continue d'assurer un toit à tous". Plus largement, il monte régulièrement au créneau pour "la reconnaissance du cirque contemporain par les différents conseils des arts à l'échelle mondiale". Son mot d'ordre : "Plein feu sur la beauté du monde là où la laideur est clairement incontournable."
- Gypsy Snider, chorégraphe
Américaine de San Francisco, Gypsy Snider, 42 ans, est "la paume de
la main droite", comme Patrick Léonard, avec lequel elle a eu deux
filles, est "le revers". Née dans une famille de cirque liée au Pickle Family
Circus, elle prend d'assaut la piste dès l'âge de 4 ans. Jeune
étudiante à l'école de théâtre Dimitri, en Suisse, elle croise la route
du Cirque du Soleil, celle de Patrick, et revient dans sa ville natale
en 2001, après avoir tracé la route pendant douze ans.
Codirectrice et chorégraphe de Loft et de Traces, elle aime évoquer la communauté formée par Les 7 doigts de la main. "Nous sommes une compagnie de performers de cirque, même si nous expérimentons d'autres formes spectaculaires." Pragmatique, elle connaît la règle du jeu de la survie artistique lorsque la subvention de l'Etat est riquiqui : travailler, travailler encore, travailler toujours, pour équilibrer la balance économique. "Les 7 doigts, c'est d'abord l'humain, la créativité, et l'originalité de chaque individu."
- Shana Carroll, trapéziste
Des sept doigts de la main, Shana Carroll, 41 ans, en choisit au
moins... deux. Elle est l'index de la main droite lorsqu'elle crée les
spectacles "pour mieux pointer les choses en gesticulant". Puis l'annulaire de la main gauche lorsqu'elle travaille au bureau de la troupe.
Originaire de Berkeley (Californie), elle délaisse le théâtre pour le
cirque à 18 ans, choisit le trapèze et tourne pendant vingt ans dans
différentes compagnies.
Copine depuis 1985 de Gypsy Snider, son premier coach - son père a
écrit un livre sur le Pickle Family Circus -, elle rencontre son futur
mari, Sébastien Soldevila, avec lequel elle a eu une fille, ainsi
qu'Isabelle Chassé, au Cirque du Soleil. "La première règle entre nous est peut-être de ne pas en avoir, glisse-t-elle. Nous essayons de réaliser ce que nous imaginons être juste et sensible. C'est une question d'instinct et de bon sens." Chorégraphe repérée, Shana Carroll a mis en scène un numéro pour trente trapézistes lors du 400e anniversaire de la ville de Québec. "Le cirque est la forme la plus adéquate pour raconter la vie."
PSY from marion bellin on Vimeo.