« Le Grand Mensonge »
Faire se poser des questions sur le 11-Septembre au travers d’une bande dessinée grand public, c’est l’idée mise en oeuvre par deux auteurs de BD à succès aux USA, Rick Veitch et Gary Erskine. Refusant le qualificatif de "sceptiques" de la version officielle (Truthers), les auteurs revendiquent haut et fort le droit au questionnement vis-à-vis d’une version gouvernementale "pleine de trous béants". Dans "Le Grand Mensonge" (The Big Lie), ils proposent au lecteur une réflexion sur de nombreux aspects de ces événements au travers d’un scénario de "voyage dans le temps" où l’héroïne revient à Manhattan, les Tours sont encore debout, et son mari – qui y périt voilà 10 ans – est au travail dans l’une des deux Tours Jumelles…
La couverture de la Bande dessinée "The Big Lie"
La bande dessinée d’Image Comics "The Big Lie" pose d’importantes questions
par Brian Truitt, pour USA Today, le 14 juin 2011
Traduction Daniel pour ReOpenNews
Il s’est passé près de 10 ans depuis le
11-Septembre, et la tragédie reste encore présente à l’esprit de
nombreux Américains. L’un d’eux est écrivain et artiste Rick Veitch, et
demeure convaincu que toute la vérité ne nous a pas été dite.
Les questions entourant cette journée
fatidique ont inspiré le thème de sa nouvelle série BD d’Image Comics :
"Le Grand Mensonge" (The Big Lie) qui réunit à nouveau Rick
Veitch et Gary Erskine et dont l’histoire débute le 7 septembre [2001].
Pour ce récit, Veitch a suivi la même structure que l’épisode de Twilight Zone de 1963 "No Time Like the Past",
dans lequel un homme utilise une machine à remonter le temps pour
tenter d’empêcher trois événements de se produire, en avertissant un
policier [de l’arrivée] de la bombe atomique sur Hiroshima, en
assassinant Hitler avant la Seconde Guerre Mondiale, et en empêchant le
naufrage du Lusitania.
Dans "Le Grand Mensonge", l’héroïne
Sandra est une femme qui a perdu son mari, Carl, lors des attentats
terroristes contre le World Trade Center à New York. Étant physicienne
[spécialiste] des particules au LHC (Large hadron Collider) ,
elle invente un moyen de voyager dans le temps, et repart dans le passé,
à Manhattan, une heure avant que le premier avion ne frappe les Tours
le 11 septembre 2001.
Elle se précipite à son bureau, une
agence de conseil de gestion du risque, mais comme elle a vieilli de 10
ans, Carl ne la reconnaît pas. Et même si elle apporte des preuves sur
son iPad, ni son conjoint ni ses collègues ne croient à ses
avertissements.
« La substance de l’histoire réside
dans sa tentative de convaincre ces "experts" que l’attentat terroriste
est sur le point de se produire, explique Veitch. Et donc, il s’agit
pour l’essentiel d’un drame émotionnel intense, étroitement mêlé aux
faits et aux questions entourant le 11-Septembre. »
L’éditeur et artiste Thomas Yeates a eu
l’idée de faire une bande dessinée sur le 11/9, et avec l’éditeur
d’Image Comics, Eric Stephenson, ils ont demandé à Veitch et Erskine de
les rejoindre, car c’étaient des fans de leurs séries de Bds publiées
chez l’éditeur Vertigo Comics « Army @ Love », qui est à la fois une satire de l’armée, et une histoire d’amour en temps de guerre.
« Il fallait encore trouver un
narrateur pour The Big Lie – et ce fut Oncle Sam lui-même -, pour que
tout se mette enfin en place, » raconte Yeates en désignant l’icône américaine sur la couverture du numéro 1 se tenant à côté des Tours jumelles en feu.
« Pour moi, ce qui est génial aux États-Unis, c’est notre liberté, » dit Yeates. « Or
les attaques du 11/9 ont été utilisées pour faire passer le Patriot
Act, qui a supprimé certaines de nos libertés parmi les plus
importantes. Alors ici [sur cette image] on voit l’Oncle Sam, couvert de
sang, qui se bat pour obtenir leur restauration. »
« Tous ceux qui ont vécu le 11/9,
depuis les rescapés de Ground Zero, à ceux qui étaient collés à leur
téléviseur, conservent un lien intime avec cette journée, raconte
Veitch. C’est véritablement un moment déterminant dans l’histoire de notre pays et du monde. »
Ce n’est pas la première fois que Veitch utilise le thème du 11-Septembre. Dans son roman BD paru chez Vertigo Comics "Can’t Get No",
il avait mis en scène la semaine d’errance d’un homme avant, pendant et
après les attentats comme un point de vue sur cet événement depuis un
microcosme particulier, mais avec "Le Grand Mensonge", Veitch explique :
« nous essayons de présenter l’ensemble du paysage macroscopique politique, financier et militaire. »
En décidant de participer à ce projet, il ne s’est pas considéré pas comme un "sceptique" (Truther), et bien qu’étant un contemporain des Pentagon Papers, du Watergate, de l‘Irangate
(Iran / Contra), et de l’invasion de l’Irak, Veitch reconnait qu’il est
sceptique vis-à-vis de toute histoire "officielle" fournie par le
gouvernement.
« À la lecture du rapport de la
Commission sur le 11/9, il est assez clair que beaucoup de preuves
importantes sur la période précédant les attentats et sur l’effondrement
des Tours ont été ignorées ou passées sous silence, » explique-t-il. «
Et je suis très en colère sur ce qui s’est passé après : la façon dont
l’Irak a été envahi sur la base de faux renseignements, ainsi que sur
son occupation mal gérée avec pour résultat plus de 100 000 morts
civils. »
Cette sensibilité exacerbée et [le goût
pour] le récit sont caractéristiques de la carrière de Veitch; cela
remonte à ses engouements pour des livres populaires tels que Miracleman ou Swamp Thing, explique Erskine. « Il
restait toujours un côté subversif, parfois dissimulé dans le texte,
mais le plus souvent jeté directement à la tête du lecteur. »
« Ce livre a certainement représenté
un projet ambitieux pour l’écrivain comme pour l’artiste, mais je suis
sûr qu’il constituera une ouvrage stimulant et générateur
d’interrogations pour les lecteurs. »
Bien que de tels récits de voyages dans
le temps se soient pas nouveaux dans la culture populaire, peu d’entre
eux se sont attaqués au 11/9 jusqu’ici. C’est encore assez récent, bien
sûr, mais « l’industrie du divertissement moderne tend à se concentrer sur des histoires qui n’appellent pas vraiment à la réflexion (empty calories stories) », dit Veitch. «
Et il y a une sorte d’amnésie culturelle dans le public en général à
propos du 11/9. Je pense que ça a été tellement traumatisant pour eux,
que la plupart des gens veulent l’oublier et se concentrer sur leur vie.
»
« Si on gratte un peu la surface du
rapport de la Commission sur le 11/9, on trouve des trous béants dans
l’histoire officielle. Il y a aussi énormément de désinformation et de
théories du complot farfelues qui doivent être démystifiées. Les gens
attentifs demandent une enquête réelle et approfondie sur toutes ces
questions lancinantes. C’est le sujet de notre livre. »
Veitch admet que "Le Grand Mensonge"
pourrait prêter à controverses dans certains milieux, mais le pays étant
tellement divisé sur le sujet actuellement, il est persuadé d’attirer
des avis tranchés des deux camps : de ceux qui veulent tout simplement
se souvenir, et de ceux qui veulent de vraies réponses.
C’est pourquoi dans ce livre, il est resté au centre, pour «
ces gens qui pourraient ne pas avoir beaucoup réfléchi à ces choses au
cours des 10 dernières années ou qui participent du va-et-vient
idéologique », déclare Veitch, qui dans cette série, veut s’attaquer à d’autres "grands mensonges" historiques.
« Se souvenir des événements du 11/9
est une chose bénéfique et légitime. Mais il est également extrêmement
important que nous obtenions une image plus claire de ce qui s’est
réellement passé. »
Brian TruittTraduction Daniel pour ReOpenNews
Illustrations
Extraits en haute-définition disponibles ici
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