Un jour, j’irai vivre en Théorie parce qu’il paraît qu’en Théorie, tout va bien. (Les mots surpendus)

mardi 8 octobre 2013

«Une success story musulmane»,

Voilà l'exemple parfait de l'intégration au Canada.
 Comme ils disent
«Au Canada, il faudra qu'il y ait un premier ministre pakistanais»
  et encore 
«Nous sommes très bien intégrés au Canada. Nous ne cherchons même pas à avoir notre propre école. Nos enfants vont à l'école publique.»
Lolo
Merci André et Xuan

Peace Village, enclave islamique au Canada

À une cinquantaine de kilomètres au nord de Toronto, des musulmans ahmadis bâtissent leur ville depuis dix ans, à l'écart des banlieues traditionnelles.
«C’est un sentiment tout à fait normal et naturel que de vouloir se regrouper entre personnes qui ont les mêmes antécédents. [...] On ne devrait pas avoir peur de la non-assimilation. On travaille, voyage et interagit avec la société canadienne», dit Lal Khan Malik, président de la communauté musulmane ahmadiyya du Canada. Des femmes se baladent. Peace Village, Vaughn, mai 2010 Quartier chinois de Toronto, mai 2010 Quartier chinois de Toronto, mai 2010 Des élèves répètent pour une pièce de théatre à l'école Africentric de Toronto, mai 2010 École Africentric de Toronto, mai 2010 Lal Khan Malik, président de la communauté musulmane Ahmadiyya au Canada, mai 2010 Course à pied à l'école Teston. 80% des élèves sont issus de la communauté musulmane Ahmadiyya voisine. Mai 2010. Compétition de saut en longueur à l'école Teston. 80% des élèves sont issus de la communauté musulmane Ahmadiyya voisine. Peace Village vu de la tour de la mosquée, mai 2010 Livraison du journal. Peace Village, Vaughn. Mai 2010. Un groupe de jeunes femmes musulmanes Ahmadiyya en discussion. Peace Village, Vaughn. Mai 2010. Des jeunes jouent au criquet devant la mosquée de la communauté musulmane Ahmadiyya. Mai 2010. Sortie de la mosquée après la prière du soir, mai 2010 Prières à la mosquée. Mai 2010. Prières à la mosquée. Mai 2010. Une femme musulmane Ahmadiyya court à la mosquée. Mai 2010. Mosquée de la communauté musulmane Ahmadiyya à Vaughn, en banlieue de Toronto. Mai 2010.
L'appel à la prière tombe sur Peace Village, terre d'islam en plein Canada. Les 3 000 habitants y sont tous musulmans. Des Pakistanais pour la plupart, mais aussi des Bengalis ou des Nigériens. Comme tous les vendredis, à 13h30 tapantes, la foi transporte ce petit peuple voilé ou moustachu de l'avenue Abdus Salam vers une immense mosquée blanche. Les dômes d'acier de Bait'ul Al Islam dominent l'horizon. Des croyantes, vêtues du niqab noir ou de voiles aux couleurs chatoyantes, se pressent vers la mosquée. Journaux en ourdou sous le bras, les hommes vêtus du ­salwar kameez, longue chemise traditionnelle pakistanaise, entrent par une porte séparée. La mosquée fait salle comble. Un millier de fidèles se tourne vers La Mecque.

Tous sont des ahmadis, pratiquant une version eschatologique de l'islam. Le secrétaire de l'association ahmadie du Canada.

Ahmed Dildar, est un ancien colonel de l'armée pakistanaise. Le vieillard à la peau parcheminée s'enflamme : «Nous ne pouvions pas pratiquer notre religion au Pakistan. Certains d'entre nous ont été tués par les autorités. Ici, nous sommes libres.» À deux pas de la station de télévision musulmane locale et de la mosquée, une gigantesque inscription : «Ahmadiya, le vrai islam.» Face à la salle de prière, un libraire vend Le Djihad des Britanniques ou La Place de la femme dans l'islam, en version arabe, ourdoue et anglaise.

Cette vague coranique au pays des caribous a commencé il y a vingt-cinq ans par la croisade d'un immigré pakistanais, Naseer Ahmad, devenu à 56 ans un homme d'affaires prospère. «En 1985, il n'y avait que de la friche à des kilomètres à la ronde. Notre communauté a acheté de grands terrains et fait transformer cela en zone constructible. Sept ans plus tard, nous avons construit - pour 4,5 millions de dollars cash - ce qui était alors la plus grosse mosquée d'Amérique. C'est cher, mais c'est le rêve de toute une communauté.» Le fondateur de Peace Village vante aussi sa cité islamique de 330 pavillons, construite entre 1998 et 2008 et dont toutes les rues mènent à la mosquée.
Des cloisons pour séparer hommes et femmes

Un ghetto ? Non, «une success story musulmane», objecte le promoteur immobilier. L'homme tapote son ventre, satisfait : «Ces maisons respectent les préceptes de l'islam. Grâce à des portes coulissantes, le salon sépare les hommes des femmes. Mais nous sommes ouverts à toutes les communautés.» Peace Village n'en est pas moins à 100 % musulman.

Au coin de Mosque Avenue, une jeune fille et sa mère, toutes deux voilées, se dirigent vers leur maison. À la vue d'un étranger, la plus jeune s'affole. Elle tourne son joli voile bordeaux. «Je suis ici depuis trois mois. C'est très bien le Canada. Très bien.» Sa mère ne souffle mot, elle ne parle pas anglais. Aussitôt deux gaillards, version orientale de Laurel et Hardy, surgissent : «Il faut demander la permission pour parler aux gens et se promener.» Heureusement, il y a aussi Moen, ancien agent de voyages volubile. Il explique que tous les foyers ont une vue imprenable sur la mosquée. «Ici, les femmes ont tous les droits, assure-t-il. J'ai divorcé de ma femme et j'ai perdu beaucoup d'argent. Elle a tout pris. Mais nous sommes au Canada, il faut respecter la loi.»

Début mars, une enquête de l'
Institut national statistique du Canada a révélé que, dans vingt ans, les minorités visibles représenteraient 63 % de la population de Toronto. À cette idée, Naseer Ahmad jubile : «Ce pays a été fondé par les Français et les Anglais. Maintenant, il y a une troisième force, c'est nous. Au Canada, il faudra qu'il y ait un premier ministre pakistanais !» Dans le discours du promoteur immobilier, Allah n'est jamais loin. Son regard se durcit lorsqu'il évoque «cette France qui ne comprend rien à l'islam». Ahmad balaie la question de l'intégration : «Nous sommes très bien intégrés au Canada. Nous ne cherchons même pas à avoir notre propre école. Nos enfants vont à l'école publique.»

Cette école primaire se trouve à quelques centaines de mètres de Peace Village. La secrétaire de la Teston Village Public School explique que 80 % des élèves sont originaires de l'enclave musulmane. Les enfants s'expriment entre eux en ourdou. Beaucoup ont des difficultés en anglais. Le midi, ils mangent des pizzas halal que prépare le personnel.

Toujours pétris de politiquement correct, mais aussi d'une grande tolérance, les Canadiens anglais refusent d'émettre une opinion défavorable. «Ce sont des gens charmants, très polis et très calmes. Ils ont parfois peur de parler, car ils s'expriment très mal en anglais», explique une chauffeuse de bus. La critique vient des autres immigrants. Barry Holmes, un agent immobilier d'origine sri-lankaise, s'indigne : «Le multiculturalisme c'est bien beau, mais les gens ne se parlent pas. Ce sont toujours des rapports de forces entre communautés. Ma communauté est petite. Nous n'obtenons pas grand-chose.»

Naseer Ahmad a l'esprit ailleurs. Il montre le Peace Plazza, son centre commercial. «Il y a plusieurs restaurants halal. Je contrôle tout ici. J'ai même créé un cimetière musulman. Peace Village est une expérience unique, qui jette les bases d'autres villages.» Il balaie l'horizon, désignant une large étendue près de la mosquée : «Nous y ferons un vaste centre islamique.»
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Multiculturel, dites-vous?
Cet homme vit le rêve du multiculturalisme canadien. Il est président de sa communauté, qui a sa mosquée et son école publique en banlieue de Toronto 


Photo : François Pesant
«C’est un sentiment tout à fait normal et naturel que de vouloir se regrouper entre personnes qui ont les mêmes antécédents. [...] On ne devrait pas avoir peur de la non-assimilation. On travaille, voyage et interagit avec la société canadienne», dit Lal Khan Malik, président de la communauté musulmane ahmadiyya du Canada.

Toronto — Centres commerciaux, chaînes de restaurants, vertes pelouses et bitume. Située à une trentaine de kilomètres à peine au nord du centre de la Ville reine, Vaughan, une localité de 285 000 habitants, est un paradis de banlieusards... venus des quatre coins du globe. La communauté italienne catholique située dans Woodbrige, un secteur de Vaughan, est articulée autour d'une immense cathédrale se dresse quelque part au loin à droite de l'autoroute 400. À gauche, sur un ciel bleu immaculé se dessine Peace Village qui, avec ses maisons cossues en briques, constitue le cœur de Maple, dans la ville de Vaughan.

«Avant, on pouvait voir la mosquée depuis l'autoroute», raconte fièrement Hamid Rahman, un membre influent de la communauté musulmane ahmadie. Mais aujourd'hui, plus de 15 ans après sa construction, la mosquée Bait'ul islam est désormais cachée par les 330 maisons qui ont poussé comme des champignons tout autour.

C'est que la municipalité de Vaughan, qui n'a acquis le statut de ville de plus de 100 000 habitants qu'au début des années 1980, se développe à un rythme effréné. La population de ce qui était jadis de vastes champs de maïs et de tomates explose. Avec 10 000 nouveaux arrivants par année en moyenne, elle pourrait atteindre 430 000 habitants en 2030. «C'est la ville qui connaît la plus forte croissance au Canada», assure Mario Ferri, conseiller municipal.

Et les nouveaux habitants qui s'y installent sont d'origine des plus diverses. Ce phénomène de peuplement des banlieues par de petites «poches» de minorités visibles n'est pas unique à Vaughan et encore moins à la grande région de Toronto. Il est également observé dans de grandes villes nord-américaines, notamment Los Angeles.

Selon un calcul fait à partir des données du recensement de 2001 de Statistique Canada, on dénombrait 6 «enclaves ethniques» au pays en 1981, tandis qu'il y en avait à cette date plus de 254. De ce nombre, 135 se trouvent à Toronto, 111 à Vancouver et 8 à Montréal.

Peu préoccupé par la cohésion sociale dans sa banlieue, qui, selon lui, va de soi, Mario Ferri explique ce qui régit son modèle de développement qui sonne un peu comme un slogan: «Ouvrez les portes de Vaughan et vous verrez le monde». «Bien sûr, on a des plans qui déterminent sur quelles terres il est permis de bâtir. [...] Mais on est toujours très accommodants. On croit qu'il y a de l'espace pour tous et que la diversité est notre richesse. Ces gens-là contribuent à embellir les lieux et ils amènent avec eux des traditions et des pratiques à partager», soutient-il.

La plupart des résidants ont fui la Ville reine pour venir profiter des grâces de la banlieue. Parmi eux, des Russes, des Latino-Américains, des gens de l'Asie du Sud, des Pakistanais et des Italiens, ces derniers représentant à eux seuls environ 45 % de la population des lieux. «À Vaughan, on est en train de bâtir l'un des plus grands projets de la communauté juive du Canada. Les juifs ont acheté 40 acres et ont construit un centre communautaire, des écoles, un centre de santé et des maisons pour personnes âgées», souligne M. Ferri.

Opération de charme ahmadie
 La communauté ahmadie a elle aussi son grand projet aux accents communautaristes. Les affaires vont plutôt rondement pour cette communauté qui, ayant essaimé dans 195 pays du monde parce que persécutée puis chassée de son Pakistan d'origine pour des divergences de croyances sur l'islam, a abouti en sol canadien. Les membres de communauté ahmadie de l'Ontario vivaient un peu partout sur le territoire avant de poser leurs pénates à Maple. «Ça devenait intéressant. On avait soudainement l'occasion de vivre à côté de notre mosquée», a dit Lal Khan Malik, président de la communauté musulmane ahmadiyya du Canada. Acre par acre, les Ahmadis ont racheté les terrains et les maisons autour après avoir demandé au promoteur d'y faire quelques modifications, notamment pour séparer plus aisément les hommes et les femmes. «C'est un sentiment tout à fait normal et naturel que de vouloir se regrouper entre personnes qui ont les mêmes antécédents. [...] On ne devrait pas avoir peur de la non-assimilation. On travaille, voyage et interagit avec la société canadienne.»

«Il n'y a absolument aucune restriction pour quelqu'un qui n'est pas de notre communauté et qui voudrait vivre ici», a insisté M. Malik, l'air toujours aussi médusé lorsqu'on lui pose la question.

C'est que depuis quelque temps, cette enclave musulmane dérange. Alors que la municipalité de Vaughan met tout en oeuvre pour faciliter la vie de ses habitants, d'autres s'inquiètent de son caractère exclusif. Venus de France, d'Allemagne et de partout au Canada, les médias ont fait leurs choux gras de ce «cas emblématique» de la doctrine multiculturaliste «au pays des caribous.»

Échaudée, la communauté semble être passée plus sérieusement en mode séduction, question de s'assurer que plus personne ne la confonde avec une quelconque communauté appartenant à une frange intégriste de l'islam. «On est surpris de voir des réticences à notre égard. C'est la même chose que les Grecs de Toronto, ils sont des maisons, des restaurants... Les Chinois aussi», a dit M. Malik en insistant sur le caractère pacifiste et ouvert de la communauté.

Vrai, par contre, que les femmes portent le hidjab et dans certains cas la burqa — un choix, disent-elles de leur propre aveu. Vrai aussi que la vie est organisée en fonction de la prière cinq fois par jour, à faire autant que possible à la mosquée. Les mariages sont souvent arrangés entre les familles, le plus souvent Pakistanaises d'origine et, bien sûr, ahmadies. Mais il serait tout aussi indu de passer sous silence le fait que les portes de la mosquée sont ouvertes à tous, que la journaliste du Devoir a pu y entrer sans voile et a eu le droit de visiter l'endroit dans ses moindres recoins, de l'extrémité du minaret jusqu'au sous-sol. Toujours prompts aux échanges constructifs, la plupart des Ahmadis de Maple ont répondu patiemment à toutes les questions qui leur étaient posées. «On a l'habitude», note Tanya Khan, jeune mère de famille et enseignante. «On organise des visites de notre mosquée pour des groupes et des coles.»

Depuis plusieurs mois, la communauté ahmadie s'est unie aux autres habitants de Vaughan pour organiser «Run for Vaughan», un événement qui aura lieu demain et qui vise à amasser des fonds pour la construction d'un hôpital qui fait cruellement défaut dans cette municipalité. N'y a-t-il pas là exprimée la volonté d'un meilleur vivre-ensemble?

Une minorité de plus en plus visible
 Il n'y a rien dans la littérature scientifique qui parle de l'inclination à coopérer des groupes ethniques selon qu'ils partagent le territoire avec d'autres groupes de minorités visibles ou des Canadiens d'origine, constate Keith Banting, directeur de la Chaire de recherche en politiques publiques de l'Université de Queen's. «Mais il y a un sondage majeur qui conclut que les communautés de minorités ne sont pas moins enclines à s'impliquer dans l'action communautaire et la recherche du bien commun», a-t-il soutenu.

La cohésion sociale est tributaire du bien-être de la communauté d'accueil, mais aussi de celle des nouveaux arrivants, qui doivent pouvoir s'intégrer socialement et économiquement. Or, bien que ces conditions ne soient pas toutes remplies, les relations semblent plutôt bonnes, admet M. Banting. «C'est de la magie ou quoi?» Un chercheur suédois séduit par le «modèle canadien» lui avait posé la question lors d'un colloque. «Je ne savais pas quoi répondre. J'imagine que c'est l'interaction qui existe entre les groupes». Le temps y est pour beaucoup, fait-il remarquer en citant les enquêtes majeures qu'a réalisées sur le sujet le sociologue et spécialiste de l'immigration et des études ethniques, Jeffrey Reitz. Ainsi, un groupe ou un individu au pays depuis longtemps capterait mieux l'essence des valeurs canadiennes.

M. Banting reconnaît que, fort heureusement, le repli identitaire qui, comme le suggère la thèse du politologue américain Robert Putnam, pourrait contribuer à la désintégration du tissu social dans un contexte d'hétérogénéité ethnique, n'existe pas au Canada. «La peur qu'ont les Européens, cette crainte que nous soyons en train de construire des sociétés parallèles, n'existe pas ici. Les indicateurs d'intégration, notamment celui de l'acquisition d'une langue, nous montrent que les immigrants s'intègrent, même dans les enclaves», analyse-t-il.

Des sondages menés auprès des minorités visibles ont montré, à sa grande surprise, qu'ils ne s'opposaient pas davantage que les Canadiens d'origine au mariage gai. «Ce qui ne veut pas dire qu'ils sont tous pour. Ils étaient divisés sur la question comme le sont le reste des Canadiens», a-t-il avancé. Des enquêtes du sociologue Jeffrey Reitz ont également montré que les immigrants installés depuis longtemps n'avaient pas moins le sentiment d'appartenance au Canada que des Canadiens d'origine.

Avant de pouvoir s'installer en banlieue et de s'acheter une propriété, certains immigrants ont vécu un purgatoire dans un milieu urbain plus instable et plus diversifié en terme de mixité raciale. L'idée de ces familles devenues plus à l'aise financièrement et qui choisissent volontairement la banlieue peut-elle expliquer le climat pacifique qui y règne? Keith Banting n'ose pas l'affirmer, mais il remarque qu'une certaine réussite économique et sociale permet effectivement à des groupes de pouvoir se concentrer dans les banlieues et d'y vivre dans une relative harmonie.

Par contre, le politologue reconnaît l'existence de «soubresauts collectifs», notamment lorsqu'il a été question de reconnaître les tribunaux de la charia. Et sans qu'il n'y ait, à proprement parler, de débats sur le port du voile ou du kirpan, le malaise persiste. Certains ne parviennent pas à voir une saine intégration dans ce qui a l'apparence d'un repli identitaire. «Le Canadien descendant européen blanc appartient certes à une majorité raciale, mais en termes ethniques, il est minoritaire. Ce pays en est un de minorités ethniques», a-t-il avancé. Devant ce constat, reste plus qu'à trouver les meilleures avenues pour organiser ce vivre-ensemble.
source                                                                                                                               
 

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