Un jour, j’irai vivre en Théorie parce qu’il paraît qu’en Théorie, tout va bien. (Les mots surpendus)

mardi 13 août 2013

« Hunger Games » où les enfants jouent à s’entretuer: Floride

Dans nos écoles au Québec, on s'énerve quand les enfants se créent des fusils avec des légos.
Lolo


The Hunger Games (Gary Ross, 2012)

"Je ne veux pas te tuer". Rylee Miller a des scrupules. Elle a 12 ans. En face d'elle, sa meilleure amie, Julianna Pettey, 12 ans aussi. Cette dernière fait moins de difficulté : "Je vais sûrement te tuer en premier. Peut-être que je vais te poignarder".

Bienvenu dans le camp d'été thématique "Hunger Games", qui vient d'ouvrir ses portes en Floride. Surfant sur la popularité de
la trilogie littéraire Hunger Games – vendue à des millions d'exemplaires et adaptée au cinéma – une école de Largo a eu l'idée de proposer un camp de vacances reprenant la trame de la saga de Suzanne Collins. Ses livres dépeignent une société fictive dans laquelle des adolescents âgés de 12 à 18 ans s'entretuent jusqu'à ce qu'il ne reste qu'un survivant, érigé en héros national. Une vision contemporaine de Sa Majesté des mouches, de William Golding, ou de Battle Royale, le film japonais tiré du roman de Koshun Takami.

Film de promo du Summer Camp Hunger Games :

Mais dans ce passage de la fiction à la réalité du jeu, certains enfants perdent leurs repères, comme le raconte une journaliste du Tempa Bay Times, qui a réalisé
un reportage édifiant dans le camp. Elle cite des dialogues pour le moins perturbants entre les 26 enfants participant à l'aventure :

"Qu'est-ce qu'on fait en premier ? Est-ce qu'on commence par se tuer ?"demande ingénument le petit Sidney, 14 ans. "Non ! pas de violence cette semaine", lui répond une monitrice. Une phrase qu'elle devra marteler tout au long de la journée, débordée par l'enthousiasme des gamins, obsédés par l'idée de s'entretuer. La violence attendra. A la fin de leur première semaine d'entraînement, les participants pourront enfin jouer à se tuer symboliquement dans le tournoi final.

Mais face au manque évident de recul des enfants face à la violence à venir, les organisateurs, "déconcertés", ont décidé d'apporter quelques modifications de dernière minute au jeu. Pour s'éliminer, les enfants devront arracher les drapeaux noués à leur taille, et l'expression "prendre une vie" a remplacé le verbe "tuer". Peine perdue. Les activités du camp ont beau ressembler à celles de tout autre camp de vacances, la morbidité de la fiction est omniprésente.

"Si je dois mourir, je préfère être tué par une flèche", lance le petit Joey à qui veut l'entendre. Ne me tuez pas avec une épée, je préfère encore me faire tirer dessus". Un peu plus loin, Frances, 10 ans, la plus jeune participante, met la touche finale à l'affiche qui annonce le tournoi final : "LOSING MEANS CERTAIN DEATH" ("Perdre revient à une mort certaine").

La révélation de l'existence du camp a suscité une levée de boucliers dans certains médias américains
Vanity Fair, Gawker, etc.). Le directeur du Hunger Games Camp, Ted Gillette, a aussitôt défendu le concept de son camp d'été,"qui utilise les livres, expurgés de leur violence, pour enseigner aux enfants le travail d'équipe et l'estime de soi, entre autres choses", rapporte le Hollywood Reporter. Il rappelle la variété des activités proposées (théâtre, arts, compétitions académiques et compétitions sportives en plein air). Les enfants, souligne-t-il, apprennent à travailler la terre et à fabriquer leurs propres arcs, mais ils tirent sur des cibles, et non les uns sur les autres, comme on le voit sur ce reportage duTampa Bay Times :

Ce camp inspiré d'un film particulièrement violent propose-t-il des activités fondamentalement différentes des jeux que pratiquent naturellement les enfants, toujours prompts à jouer aux cowboys et aux indiens ?

"Les enfants peuvent feindre la mort au cours de presque n'importe quel jeu, de nos jours, explique au Tampa Bay Times le psychothérapeute Simon Bosès.Mais lorsqu'on prend un moment pour discuter avec eux et qu'ils disent : 'Je vais te tuer', ils ne comprennent pas ce qu'ils disent. La mort, à cet âge, n'est pas quelque chose de final. C'est un retour à la case départ."

Pour Susan Toler, psychanalyste spécialiste des enfants, en revanche, l'idée même de ce camp est "impensable". "Quand les enfants lisent des livres ou regardent des films, ils sont simples observateurs, à l'écart des tueries. Mais quand ils commencent à s'approprier le rôle et à l'incarner pleinement, ça devient plus proche. La violence devient alors nuisible".
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