Un jour, j’irai vivre en Théorie parce qu’il paraît qu’en Théorie, tout va bien. (Les mots surpendus)

mardi 8 mars 2016

Journée de la femme : le ridicule au service du sexisme

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Journée de la femme : le ridicule au service du sexisme 

Leur apporter des fleurs ? Le petit déjeuner ? Cesser pendant 24 heures de tenir des propos salaces ?
Philippe Joutier
441 journées mondiales, auxquelles s’en ajoutent 46, nationales. Avec ses malheureux 365 jours, le cosmos n’en peut plus, des revendications humaines. Chaque jour de l’année devient une journée « de ».

Si une journée dévolue à une maladie – dépistage des cancers (30 mai) -, à une action – le Téléthon (1er week-end de décembre) – ou à une commémoration peut avoir du sens, que faut-il penser de celle qui sert à promouvoir la chips (22 janvier), le Nutella (5 février), l’absence de pantalon (13 janvier), la douane (26 janvier) ou les guides touristiques (21 février) ?

Aujourd’hui, ce sera donc celle des femmes. Coincée entre celle de la prière (6 mars) et celle de la plomberie (11 mars), nul doute que cette journée fera avancer leur cause ! Mais d’abord, de quelles femmes parlons-nous ? Sans doute pas les Africaines, traitées à part (31 juillet). Pas davantage les femmes rurales (15 octobre) ou les filles (11 octobre)… Heureusement, la journée mondiale de la ménopause (18 octobre) reste encore pour le moment hors catégorie !

Mais ne chipotons pas, et voyons plutôt l’action : leur apporter des fleurs ? Le petit déjeuner ? Cesser pendant 24 heures de tenir des propos salaces ? Ça doit être encore possible, car le refus de la violence à l’égard des femmes a déjà sa journée (25 novembre), comme l’élimination de la violence sexuelle en temps de conflit (19 juin). Suffisait de le dire aux militaires serbes pendant la guerre de 1992-1995 en Bosnie-Herzégovine ! Cela les aurait sûrement dissuadés de mettre à la disposition de qui en voulait les femmes et les gamines d’à peine 12 ans enfermées à Foča.

Cette journée « de » est la marque de notre impuissance à simplement banaliser l’égalité des sexes. Les femmes demeurent coincées entre condescendance et théorie du genre, autre extrémité du sottisier qui, en prétendant nier toute différence, renforce encore le sexisme !

Dès qu’elle sort du cadre où on l’imagine traditionnellement – le ménage, les enfants, l’assistance -, une femme se voit obligée de récuser féminité et séduction au risque d’être considérée comme futile. Mais pourquoi serait-ce incompatible ? C’est, d’ailleurs, en réaction à cette différence d’image que certaines actrices X revendiquent haut et fort leur pornographie et affirment leur activité comme forme d’action sociale. Pourquoi les déconsidérer alors que leur partenaire masculin est admiré ?

Les mots eux-mêmes sont complices : un coureur, c’est un joggeur ; une coureuse, c’est une pute ! Un professionnel, c’est un artisan ; une professionnelle, c’est une pute ! Un entraîneur, c’est un coach ; une entraîneuse, c’est une pute ! Un homme facile, c’est un homme agréable à vivre ; une femme facile, c’est une pute ! Un péripatéticien, c’est un élève d’Aristote ; une péripatéticienne, c’est une pute !

Encore aujourd’hui, les femmes sont obligées de lutter contre une violence masculine et une discrimination sexuelle aussi odieuse que stupide ! Infibulation, viols, mariages forcés, lapidation, confinement ou simplement différences de salaire… Pourtant, y compris dans la politique, les femmes ont fait largement la preuve de leur compétence : elles conduisent mieux que nous, elles réussissent mieux dans les concours, elles sont souvent plus exigeantes. Il est grand temps d’en prendre la mesure et d’en tirer des conclusions qui méritent mieux que de les réduire à une seule journée.


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