S’il est nécessaire, dans une démocratie, que tout un chacun
donne son avis pour légaliser ce qui est légitime, encore faut-il s’entendre
sur la signification des mots et des termes que l’on emploie, ce qui semble de
moins en moins le cas dans ce débat sur la Charte des valeurs québécoises.
Cela devient un brouhaha dans lequel des voix, de plus en
plus perchées sur les détails, deviennent des sirènes annonçant mille maux à
venir, et cochon qui s’en dédit ! Peut-être serait-il bon de définir le
cadre et les éléments du débat.
Nous sommes dans une démocratie : ce qui implique que
les lois communes ont pour but de garantir les droits individuels, à la
condition que le droit de l’un n’empiète pas sur celui de l’autre.
Par exemple, la laïcité qui impose la neutralité de l’État
pour protéger les croyances de chaque citoyen et chaque citoyenne. Pour que ce
concept soit crédible, il faut que ceux et celles qui le représentent affichent
une neutralité ostensible.
Ce qui ne les empêche nullement de porter des signes
discrets d’une appartenance en pendentif, main de Fatima, Croix du Saint-Esprit
ou Livre de la loi. Au choix.
Prenons en exemples des faits précis : ne pas, au nom
de sa foi, refuser d’obéir à un agent de police parce que c’est une femme (sic)
ou l’examen médical d’une femme, sous prétexte que le docteur est un homme.
Le cas le plus cocasse que je connaisse est la mise à la
porte de l’Hôpital juif d’un ambulancier parce qu’il mangeait un sandwich non
« casher ». De petits riens qui font un tas tant qu’on ne légifèrera
pas.
Cela s’applique également à l’éducation, dès la petite
enfance.
La foi, quelle qu’elle soit, fait partie du domaine exclusif
des parents et de leur intimité, l’État, pour respecter leur choix, se doit de
n’en privilégier aucune.
Les parents doivent pouvoir, s’ils le désirent, envoyer
leurs enfants dans une école religieuse ou privée, laquelle, pour obtenir un
financement identique aux écoles publiques, devra enseigner les matières
scolaires propres à l’année scolaire. Ce qui n’est pas toujours le cas,
actuellement. Voir du coté d’Outremont...
En ces lieux, foi et religion ne font qu’un. Ce qui est faux
dans l’espace public (ou étatique) peut être vrai dans l’espace intime de
chacun.
Ce ne sont pas les croyances qui sont dangereuses mais les
implications qui en découlent, selon les dogmes des religions. Or ceux-ci ne se
discutent pas : pour un croyant zélé, ils s’appliquent. Point barre !
C’est le même pourtant qui réclamera une dérogation
raisonnable et non négociable. Car « les libertés que nous vous réclamons
au nom de vos principes, nous vous les refusons au nom des nôtres ». (Léon
Blois)
Celles qui, au nom de leur foi, demandent la liberté de
porter le voile en tout lieu, parce que c’est leur choix, savent-elles qu’au
nom de leur foi dans certains pays, dont souvent elles sont issues, une femme
doit porter ce voile pour ne pas être légalement punie ? Alors qu’ici,
hors de leurs fonctions dans le service public, elles peuvent se voiler si
l’envie leur en dit.
« À Rome, on fait comme les Romains ». Pourquoi
pas au Québec aussi ?
Quant au patrimoine, c’est un ensemble inclusif de relais
qui situent les origines et l’histoire d’une société : autant la croix du
Mont-Royal que la petite église anglicane de Québec ou la faculté de théologie
presbytérienne de l’Université McGill en font partie.
Le patrimoine, ce sont les survivants de l’oubli.
Peut-être que ce débat sur ces choix, un jour, en fera
partie.
« Mais nous serons morts mon frère ».
Mis en ligne sur Sisyphe, le 14 septembre 2013
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