Tous les hommes politiques présentés comme des saints par
les médias doivent être regardés avec beaucoup de suspicion. Qu’ils se
nomment Barack Obama, Abbé Pierre, Che Guevara ou Soeur Thérésa, leur
image est presque systématiquement utilisée par les forces noires comme
un panneau de lumière cachant de sombres intérêts. En guise d'exemple,
nous publions un extrait du livre d’Alain Daniélou, Histoire de l’Inde, concernant Ghandi, «l’apôtre de la non-violence» qui a été responsable de la mort d’un demi-million d’hindous.
Mohan bas Gandhi (1869-1948) était le fils d’un fonctionnaire au
service d’un petit prince du Kathiawar. Il fit en Angleterre des études
d’avocat et devint membre du barreau de Londres. C’est vêtu de la
redingote noire et du col rigide de l’avocat anglais qu’il se rendit en
Afrique du Sud pour diriger un mouvement qui réclamait l’égalité des
droits pour les Indiens et les Européens.
Après un bref séjour dans les prisons de Pretoria, il arriva en Inde
en 1914 et commença aussitôt à jouer un rôle dans l’effervescence
politique qui régnait durant la Première Guerre mondiale.
Gandhi s’empara de la direction du parti du Congrès et en éloigna
les grands leaders modérés qu’avaient été Tilak, Lajpat Rai, S.N.
Banerjee et Gokhale.
Peu à peu, Gandhi changea sa personnalité et son apparence. Le jeune
avocat révolutionnaire anglicisé, venu d’Afrique du Sud, se mua en
moine indien, demi-nu et vêtu de bure. On prétendit que cette
transformation lui avait été suggérée par le leader musulman Mohammed
Ali Jinnah.
L’aspect de prophète de Gandhi impressionna les Occidentaux. Ses compagnons lui donnèrent le titre de Mahatma
(«grande âme»). Toutefois, il ne convainquit jamais les élites du monde
traditionnel hindou qui le considéraient comme un imposteur et un
dangereux politicien.
L’usage fait par Gandhi de la théorie de la non-violence comme arme
politique n’a rien à voir avec la tradition hindoue. La non violence est
une technique de perfectionnement strictement individuelle et qui ne
relève que du plan spirituel. Elle ne peut servir à des fins politiques,
ni avoir de place dans le gouvernement des États. Toute la Bhagavad
Gita, livre sacré majeur de l’Inde, est une leçon donnée à Arjuna qui
voulait renoncer à la violence et manquer ainsi à son devoir de prince
et de soldat.
Gandhi a en fait été – grâce à ses théories sur la non-violence –
l’instrument de massacres à une échelle presque sans précédent
historique, qui ont précédé et suivi la division de l’Inde.
L’hindouisme n’est pas une religion, dans le sens que l’on donne
généralement à ce mot. Il n’y a pas, dans l’hindouisme, de prophètes qui
aient établi une fois pour toutes des «vérités» qu’il faut croire ou
des règles de conduite inaltérables et communes pour tous. L’hindouisme
est une philosophie, un mode de pensée, qui pénètre et coordonne tous
les aspects de la vie et cherche à l’harmoniser avec un monde infiniment
diversifié, dont les causes profondes sont hors de portée de l’esprit
humain. Même dans les classes sociales les moins évoluées, la tolérance
apparaît comme une vertu fondamentale. Chacun cherche à faire de son
mieux, selon ses capacités, mais nul ne peut savoir quel est le chemin
qu’un autre doit suivre pour se rapprocher du divin, pour réaliser ce
qu’il est car tous les êtres sont différents. Et nul ne peut juger des
intentions mystérieuses des dieux qui font naître l’un riche, beau,
intelligent, robuste, l’autre pauvre, laid, stupide ou malade.
La violence, l’assurance excessive, le dogmatisme irréfléchi, le
prosélytisme des musulmans et des chrétiens, semblent aux hindous des
attitudes naïves et impies.
Quel fou peut se prétendre informé des intentions secrètes des
dieux? C’est pourquoi les conversions des hindous à l’Islam et au
Christianisme ont été rares et n’ont eu lieu que dans les classes
sociales inférieures; et cela par la force, par intérêt, ou par
nécessité de survie. Ces conversions restent le plus souvent
superficielles. Il existe de très nombreux musulmans dans l’Inde qui
sont végétariens, observent les règles de purification hindoues,
vénèrent Kali la déesse de la mort et chantent les amours de Krishna.
Les manœuvres politiques qui permirent de soulever l’une contre
l’autre ces deux communautés, – pourtant très imbriquées depuis des
siècles – avaient été préparées de longue date dans le but de conduire à
une division de l’Inde, avec l’idée de permettre à l’Angleterre de
maintenir son contrôle sur le continent indien, lorsque l’indépendance
paraîtrait inévitable.
Prenant prétexte des émeutes qu’il avait lui-même organisées, le
gouvernement britannique proposa une division de l’Inde, entre le
Pakistan musulman et une Inde hindoue (Bharat). Ce qui fut accepté par Gandhi et par le Congrès, malgré l’opposition de tous les éléments modérés, hindous et musulmans.
En mettant sur le même plan l’Inde et le Pakistan, l’Angleterre
divisait le continent entre un État laïc multireligieux, où les droits
des citoyens étaient définis par des lois modernes, et un État
théocratique – le Pakistan – où seule était admise la loi coranique, qui
ne reconnaît aucun droit aux non-musulmans et fait de leur meurtre une
vertu. Les partis hindous ne furent jamais consultés par Nehru – qui
était agnostique – et Gandhi, cet illuminé réformiste qui ne
représentait en rien la population hindoue.
Le déguisement de Gandhi en saint homme fut un masque habilement
utilisé pour faire croire au monde qu’il représentait les hindous.
Suite à la partition, plus de la moitié des musulmans restèrent en
Inde; en revanche, les hindous du Pakistan furent spoliés, massacrés,
privés de droits civiques et de protection. Les survivants quittèrent en
masse leurs maisons, leurs terres, leurs villages, dans un exode qui
fut l’un des plus effarants des temps modernes. Des millions de
malheureux prirent refuge dans une Inde déjà surpeuplée. Beaucoup
moururent de faim et de misère dans des camps improvisés ou dans les
rues de Calcutta, transformées en cour des miracles. Les massacres et
les transferts de population qui suivirent la partition furent
effrayants. Une estimation modérée fait état de 500'000 morts et de dix
millions de personnes déplacées.
Quand la tension créée par les réfugiés menaça de provoquer un
massacre des musulmans restés en Inde, Gandhi – qui était parti pour
essayer de calmer l’agitation du Bengale – revint à Delhi pour défendre
les musulmans menacés de représailles et pour exiger le paiement au
Pakistan d’une partie des réserves monétaires.
Le 20 janvier 1948, il fut assassiné alors qu’il assistait à une
réunion de prières à New Delhi. La raison principale de cet assassinat,
par un jeune brahmane appartenant au parti orthodoxe, était l’inquiétude
causée par l’hostilité de Gandhi envers les institutions
traditionnelles des hindous. Cette hostilité était considérée comme
beaucoup plus pernicieuse que l’indifférence des Anglais.
Une autre raison était l’attitude trop conciliante de Gandhi envers
les musulmans, malgré les massacres terribles qui avaient précédé et
suivi la partition de l’Inde. Gandhi recommandait de gagner la
coopération par l’amour et le désintéressement, alors que les musulmans
de l’Inde et du Pakistan chantaient partout: «Nous avons eu le Pakistan
pour une chanson, Delhi nous coûtera une bataille». Toute publication du
plaidoyer que prononça le meurtrier pour expliquer son geste a été
interdite en Inde.
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